Le temps est élastique

Il y a quelques années, j’ai donné une conférence sur le thème « Comment mieux contrôler son temps libre ».

J’y ai raconté l’histoire d’une amie dont le lave-linge est tombé en panne pendant la semaine où elle traquait son temps.

Les conséquences de ce désastre ont consommé, pour elle, sept heures d’une semaine déjà incroyablement chargée. Sept heures… Un chiffre intéressant, car il équivaut à « trouver une heure de plus dans la journée » (chaque jour de la semaine) : une promesse que j’ai lue sur de nombreuses couvertures de magazines ou titres de blogs en tous genres. Et pourtant, si on s’était posées au début de la semaine et qu’on avait essayé de trouver sept heures pour quelque chose comme s’entraîner pour un marathon ou préparer une formation, j’imagine qu’on aurait eu du mal.

Alors, que s’est-il passé pour mon amie ? Le fait est que le temps est élastique. Lorsqu’on décide de faire quelque chose, on trouve toujours le temps de le faire. D’autres choses ne se font pas, ou prennent moins de temps, ou sont reportées à plus tard. Beaucoup de choses se révèlent bien plus malléables qu’on l’aurait imaginé. L’un des principes-clés de la gestion du temps consiste à traiter les choses que nous voulons faire avec la même urgence que les choses que nous devons faire. On leur consacre en premier le temps nécessaire et on laisse le reste s’adapter.

Plus facile à dire qu’à faire, c’est certain. Mais je continue d’essayer. Cette semaine, par exemple, s’est avérée contenir plus de choses chronophages que je ne l’avais prévu, principalement sur le plan personnel, mais aussi sur le plan professionnel. Ainsi va la vie. J’avais prévu de profiter du fait que j’étais chez Sup de Pub mais sans animer d’atelier le jeudi pour avancer pas mal de sujets administratifs pour Boots & Cats, tout en assurant un service « conso » pour les équipes PPP et passer un peu de temps à échanger avec les étudiant·es. Lorsque j’ai appris un décès et que j’étais la seule personne disponible pour représenter notre côté de la famille aux funérailles, il a fallu que je trouve d’autres moments pour les tâches admin et d’autres moyens pour échanger avec les étudiants.

Mais j’ai décidé que le temps était élastique. J’aurais le sentiment d’avoir accumulé du retard d’une manière ou d’une autre, que je fasse les choses dont j’ai envie (en plus des choses que je dois faire) ou non. Donc, j’ai choisi les activités plaisir que je voulais honorer cette semaine (mes cours de chants) et celles que j’allais sacrifier (une soirée ciné).

Le cours de technique vocale hier soir m’a fait un bien fou. Pendant une heure trente, j’ai déconnecté du boulot, des arrangements floraux à commander, des agendas des uns et des autres avec lesquels composer. Je suis entrée en communion avec mon larynx et ma cavité pharyngée, j’ai exploré des dimensions méconnues de mes résonnateurs et travaillé mon « twang ». La terre ne s’est pas arrêtée de tourner, les questions d’agenda, les commandes de fleurs et les tableaux de facturation étaient toujours là quand je suis rentrée et j’ai travaillé une bonne heure l’esprit clair, pleine de cette énergie animale que provoque une activité physique (oui, chanter est une activité physique, ceux qui se moquent n’ont jamais essayé) en fin de journée. Et pour le reste, je trouverai une solution, j’en suis certaine.

Crédit Photo : Alex Lion on Unsplash